Adoptée au début du quinquennat en pleine polémique sur la suppression de l’impôt sur la fortune, la flat tax sur les revenus du capital a rapporté 3,5 milliards d’euros en 2018. C’est 600 millions de plus que les bénéfices escomptés par l’administration fiscale. Explications.
Deux ans après l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement décidé à privilégier l’investissement productif par rapport à la rente, l’heure est venue de faire un premier bilan des réformes fiscales adoptées en début de quinquennat. Tel était l’objet du rapport annuel sur l’application de la loi fiscale présenté en juillet par le député LREM Joël Giraud.
Premier enseignement : l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) qui est venu remplacer l’impôt sur la fortune (ISF), a rapporté 1,3 milliard d’euros au lieu des 850 millions inscrits au budget. La deuxième surprise du même ordre, ce sont les bonnes recettes de la flat tax, prélèvement forfaitaire unique sur les dividendes, intérêts et plus-values qui avait fait couler beaucoup d’encre lors de son adoption dans la mesure où il renonçait à toute notion de progressivité.
Considérée par l’opinion comme un cadeau aux plus fortunés, la conjonction de ces deux réformes avait contribué à forger d’Emmanuel Macron l’image d’un « Président des riches », bien avant qu’il n’ait à essuyer la colère des Gilets jaunes. Au regard de leur revendication concernant le rétablissement de l’impôt sur la fortune, l’information selon laquelle les recettes de l’IFI représenteraient un « manque à gagner » de 3 milliards par rapport à l’ISF est sans doute celle qui retiendra le plus l’attention des commentateurs.
La flat tax : efficace pour certains, inéquitable pour d’autres
Mais certains préfèrent ces jours-ci se pencher sur les conséquences de la flat tax, en comparant ses effets à ceux du mode de taxation du capital en vigueur sous François Hollande. A l’époque, ces revenus étaient taxés de 15% en plus de l’impôt sur le revenu, perçu, lui, selon un taux variant de 14 à 45% en fonction de la tranche d’imposition du contribuable. Il s’avère que la flat tax, forfait unique de 30% incluant les prélèvements sociaux, « a rapporté plus que l’imposition progressive de 2017, pourtant plus lourde ». Explication : l’allégement de la fiscalité a relancé le versement de dividendes, qui ont cru de 7,2 milliards d’euros, soit 24 % de plus qu’en 2017.
Etienne Lefevre, dans Les Echos, y voit un camouflet pour ceux qui, notamment à gauche, redoutaient une amputation des recettes fiscales. L’éditorialiste pointe les bénéfices de la réforme pour la Sécurité sociale, la hausse de 50% des prélèvements sur les dividendes ayant entraîné un surcroît d’un milliard de recettes. « La réforme Macron, conclut-il, confirme que la fiscalité du capital, très mobile, doit être plus que tout autre adaptée de manière pragmatique et non idéologique ».
Mais ce nouveau mode de taxation n’est pas du goût de tous. Ainsi Guillaume Duval, éditorialiste à Alternatives Economiques, dénonce dans Marianne son caractère inéquitable. « C’est une très bonne opération pour les très riches, puisqu’ils sont taxés à un taux inférieur que s’ils payaient selon le barème de l’impôt sur le revenu. » D’autant, ajoute-t-il, que les classes moyennes sont davantage taxées que dans le système précédent dès lors qu’elles touchent des intérêts sur leur épargne. Autre effet d’aubaine pointé par l’économiste : au vu du nouveau système, les patrons qui auront choisi de se rémunérer en dividendes plutôt qu’en salaires, auront soustrait des sommes conséquentes à l’impôt sur le revenu et à la CSG. Quant à cet « argent dormant » redistribué aux actionnaires, il pourrait venir à manquer le jour où les entreprises seront obligées de financer leurs investissements à des taux supérieurs à ceux, très bas, actuellement en vigueur.