Taux bas : danger pour les entreprises ?

Taux bas : danger pour les entreprises ?

Avec les taux d’intérêt historiquement bas, voire négatifs, jamais l’argent n’a coûté aussi peu cher. Par conséquent, les entreprises, comme les ménages, accentuent leur tendance à l’endettement. Mais gare au retour de bâton, préviennent les économistes. 

Semaine après semaine, la baisse continue. De 1,26 % en mai, le coût moyen du financement à cinq ans des entreprises est passé à 1,05 % en juin. Cas extrême, à la limite du rocambolesque : celui des taux négatifs. Début juillet, Schneider Electric a émis 200 millions d’euros d’obligations à -0,043% sur cinq ans. Se financer à de telles conditions revient à être rémunéré pour emprunter de l’argent. 

Conséquence logique de ces taux plancher : le nombre des crédits augmente en flèche : +7% en juin dernier. La bonne nouvelle, c’est que ces emprunts continuent de servir les investissements (4,5% sur un an) qui feront la productivité et les profits de demain. La mauvaise, à première vue, c’est que l’endettement brut des entreprises françaises atteint aujourd’hui des niveaux très élevés. Avec 73,3% du PIB, contre 69,7 il y a deux ans, il est aujourd’hui parmi les plus hauts des économies occidentales, Japon mis à part. Si la plupart des économies européennes ont tendance à se désendetter depuis la crise de 2008, la situation qui prévaut en France se retrouve en Allemagne. 

Pas de quoi inquiéter le Haut Conseil de stabilité financière, qui fait remarquer que les entreprises profitent de cet endettement pour accumuler les liquidités, elles qui ont déjà fait des efforts pour renforcer leurs fonds propres ces dernières années. La Banque de France va dans le même sens en soulignant la baisse continuelle du poids des intérêts de la dette dans le bilan des entreprises hexagonales. 

Le poison lent des taux d’intérêt bas

Mais d’autre voix font part de leur inquiétude sur le long terme. Pour beaucoup d’économistes, l’endettement à moindres frais est perçu comme un « poison lent », un euphorisant qui empêche de s’attaquer aux problèmes… ou qui peut provoquer un réveil brutal en cas de remontée des taux. 

Comme plus de la moitié des entreprises emprunte à taux variable, un tel phénomène pourrait se traduire par des faillites et des licenciements. Précision de la Banque de France rapportée par les Echos : l’impact sur les entreprises d’une remontée des taux « serait d’autant plus marqué que, au delà de l’effet lié au refinancement progressif des dettes arrivées à maturité, 38% de l’endettement des sociétés non-financières est à taux variable. » 

La menace est d’ordre structurel. Un retournement de conjoncture, avec moins de croissance que prévu et une remontée brutale des taux pourrait provoquer une crise de grande ampleur. Car ce qui est vrai pour les entreprises l’est aussi pour les ménages (avec la constitution de bulles immobilières) et pour les Etats. 

«Le risque, c’est le choc, explique au Figaro Philippe Waechter, chef économiste chez Ostrum Asset Management. Si l’État a jusqu’ici soigneusement amorti les différents chocs, il manque aujourd’hui de marge de manœuvre, étant donné que son taux d’endettement se rapproche également des 100%. » Pour l’économiste, un tel scénario semble toutefois exclu car les banques centrales n’ont aucun intérêt à remonter les taux, dans la mesure où l’endettement des entreprises est un phénomène qui concerne toute l’Europe. 

Autre scénario évoqué par Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’épargne, même si, là encore, la perspective est lointaine : celui de la récession, du fait d’une incapacité croissante des entreprises à rembourser leurs emprunts, ce qui provoquerait un appauvrissement des banques. Celles-ci s’émeuvent déjà de la situation. Payées pour vendre de l’argent à long terme, elles risquent d’être confrontées à des problèmes de rentabilité si la tendance se poursuit. 

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