Alors que le Sénat examine le projet de loi contre le gaspillage et pour l’économie circulaire, le shopping de mode d’occasion et autres initiatives écoresponsables se multiplient.
Pas moins de 630 millions d’euros de produits sont détruits chaque année, soit l’équivalent d’un peu plus de 7 fois la somme perçue par le Téléthon en 2018, s’alarme le ministère de la Transition écologique et solidaire.
C’est dans le but de « mettre un terme à ces pratiques intolérables » que le gouvernement a présenté, en juillet dernier, son projet de loi pour une économie circulaire. L’exécutif espère notamment faire interdire la destruction des produits du quotidien et des textiles invendus, favoriser la réparation et l’utilisation des pièces détachées, améliorer la gestion des déchets du bâtiment, renforcer le principe du pollueur payeur et introduire un bonus/malus environnemental à l’attention des fabricants qui conçoivent leurs produits de manière écologique.
Le secteur de la mode est particulièrement concerné. En trente ans, celui-ci est passé de 450 milliards d’euros à près de 2 200 milliards par an, comme le rappelle la journaliste Dana Thomas. Une croissance qui n’a pas été sans conséquences, notamment pour l’environnement.
La Banque mondiale estime en effet que la « fast fashion » (le fait de renouveler très rapidement des vêtements proposés à la vente) est responsable de 20 % de toute la pollution industrielle de l’eau chaque année. Et McKinsey d’enfoncer le clou : selon le cabinet de conseil, l’industrie de la mode est à l’origine de 10 % des émissions de carbone dans l’air et utilise un quart de tous les produits chimiques produits dans le monde. Sans parler du gaspillage : sur plus de 100 milliards de vêtements produits chaque année, environ 20 % ne sont pas vendus. Ils sont généralement enterrés, déchiquetés ou incinérés.
Mode d’occasion, nouvelle tendance
Alors, que faire ? Pour le gouvernement français, la quantité de produits textiles détruits chaque année dans l’Hexagone doit impérativement passer de 20 000 tonnes actuellement à… zéro. Pour cela, « toutes les enseignes, producteurs, distributeurs et plateformes de commerce en ligne, y compris pour le secteur du luxe, auront l’interdiction de détruire leurs invendus ». Grâce à cette mesure, le gouvernement vise à faire économiser 250 000 tonnes par an de C02, soit l’équivalent des émissions de 125 000 voitures par an.
Bonne nouvelle : le secteur de la mode n’a pas attendu le législateur français pour agir. Si le marché de l’habillement d’occasion est encore faible en France (1 milliard d’euros en 2018, selon l’Institut français de la mode), il progresse à grands pas. La preuve : les plateformes proposant de la mode d’occasion se multiplient.
Née en 2009, Vestiaire Collective vend aujourd’hui dans 57 pays. La plateforme, qui a réalisé 140 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2017, propose près de 5 000 marques haut de gamme et 3 500 nouveautés par jour. Pas moins de 145 000 transactions sont réalisées chaque mois.
Lutter durablement contre le gaspillage
Créée également en 2009 et rachetée récemment par Leboncoin, Vidressing propose quant à elle « une véritable révolution dans la façon de consommer et de vivre la mode ». La plateforme permet à ses utilisateurs de plonger dans les garde-robes des « fashionistes » du monde entier pour trouver « des pièces merveilleuses à prix irrésistibles ». Plus de 10 000 marques et 1 million d’articles figurent au catalogue.
Vinted, start-up lituanienne créée en 2008 et lancée en France en 2013, permet de vendre ou d’échanger ses vêtements dans un délai restreint. La plateforme, qui revendique 9,5 millions d’inscrits en France (sur un total de 21 millions), emploie 200 personnes et estime à 1,4 milliard d’euros son volume d’affaires. Parallèlement, les grands noms de la mode adoptent de leur côté des pratiques de plus en plus responsables.
Alors que l’écologie devient la deuxième préoccupation des Français, tout juste après le pouvoir d’achat, l’anti-gaspillage pourrait devenir l’objectif premier des consommateurs.