Le comité d’évaluation mis en place pour mesurer les effets d’une des réformes phares du début de quinquennat vient de remettre son premier rapport. S’il est encore trop tôt pour déterminer l’impact de la suppression de l’ISF sur l’économie française, certains signaux sont encourageants.
C’est l’une des reformes les plus symboliques (et les plus controversées) votées au début du mandat d’Emmanuel Macron : la suppression de l’impôt sur la fortune, jugé décourageant pour les « premiers de cordée » et d’une efficacité douteuse pour les finances publiques. A la place avait été adopté un impôt sur la fortune immobilière assorti d’une taxe forfaiture unique sur les revenus financiers (dite « flat tax »).
En décembre 2018, une instance pluraliste placée sous l’égide du think tank France Stratégie avait été chargée de l’évaluation de cette réforme. Evaluation qui revêt toute son importance depuis que le Président a déclaré en avril, sous la pression des Gilets Jaunes et des résultats du grand débat, qu’il était prêt à revoir sa copie si jamais la réforme n’offrait pas les avantages escomptés.
Il va falloir patienter encore un moment pour avoir la réponse. En annexe du volumineux rapport de 300 pages rendu mardi, le comité d’évaluation précise d’emblée que la réforme « mettra des années à porter l’ensemble des fruits que l’on attend ». Avec 9 mois d’évaluation effective, c’est trop peu pour voir si la réforme a profité à l’économie productive comme c’était son ambition. Sans doute faudra-t-il attendre le rapport de 2021 pour commencer à se faire une idée précise sur le sujet.
Les ménages les plus aisés favorisés
En attendant, ce que Le Figaro appelle « des frémissements encourageants » ont été relevés. A commencer par la baisse de moitié du nombre de contribuables à l’ISF exilés à l’étranger (376 en 2017 contre 632 l’année précédente, seuls chiffres consolidés disponibles à ce stade). Le Monde précise pour sa part, citant un des membres du comité, qu’il est trop tôt pour y voir un lien de causalité avec la réforme.
C’est un peu le cas pour l’ensemble des indicateurs, relève le quotidien du soir, qui fait état de « divergences sur l’avis à rendre, reflet du caractère toujours politiquement inflammable de la suppression de l’ISF ».
Les effets à court terme pour les ménages les plus riches sont, quant à eux, plus faciles à calculer : après la substitution de l’IFI à l’ISF, quatre ménages gagnants sur cinq figurent parmi les 15 % les plus aisés. Pas de quoi pour autant faire exploser les inégalités, puisque, comme le notent Les Echos, « l’indice de Gini, qui mesure l’importance des inégalités de revenu, de l’ordre de 30 points en France, augmente de 0,3 point. » Quant aux « petits riches », ces ménages propriétaires de biens immobiliers dont la droite craignait qu’ils auraient été pénalisés, ils ne l’ont pas été outre mesure.
La flat tax plus attractive que la suppression de l’ISF
Les sommes récupérées par la flat tax ont-elles été réinvesties dans l’économie réelle ? A cette question cruciale, le comité a tenté de répondre, faute de mieux, en interrogeant des gestionnaires de patrimoine. D’après leurs premières observations, l’argent gagné aurait davantage été dépensé qu’investi dans l’économie productive à travers l’achat d’actions. Mais là encore, le constat peut aussi bien être imputé à un contexte de marché.
Autre question : celle de l’impact de la réforme sur l’attractIvité du pays. Le coût de la réforme de la fiscalité du capital s’élève à 4,5 milliards d’euros, un peu moins que ce qui avait été prévu par le gouvernement. Son volume rapporté au PIB en fait toujours l’une des plus élevées d’Europe. Pour autant, l’attractivité fiscale de la France s’est améliorée en deux ans. C’est ce que conclut l’étude quantitative réalisée auprès d’investisseurs incluse dans le rapport, qui impute davantage ce résultat à la baisse de l’imposition des intérêts induite par la flat tax qu’à la fin de l’ISF.