Retraites : Macron rode sa réforme devant des Français inquiets

Retraites : Macron rode sa réforme devant des Français inquiets

Le grand débat permanent : telle est la formule que privilégie désormais Emmanuel Macron pour s’adresser aux Français. Jeudi dernier, le chef de l’Etat était à Rodez (Aveyron) pour évoquer la réforme des retraites, chantier phare de la deuxième partie de son quinquennat.

Dans une actualité marquée par la mort de Jacques Chirac, l’incendie de l’usine Lubrizol de Rouen et l’attentat contre la préfecture de police de Paris, on en oublierait presque que la réforme des retraites entame son marathon avant un vote au Parlement prévu l’an prochain. 

Devant 500 lecteurs du groupe La Dépêche, pendant plus de trois heures, Emmanuel Macron a joué de pédagogie pour convaincre de la justesse et de la transparence du système qu’il espère voir adopté à l’été 2020, à l’issue d’une consultation nationale. 

Il a rappelé les points saillants de cette réforme censée mettre un terme, à partir de 2025, au casse-tête permanent du financement des retraites. Premier constat : « Le système n’est plus universel parce que nous avons 42 régimes différents ». Le passage au système à points est censé redonner de la lisibilité et de l’équité, là où les situations particulières se sont multipliées. « Comment on fixe ces points ? a fait mine de s’interroger M. Macron. C’est le débat que l’on doit avoir ». 

Lever les inquiétudes 

Et le Président d’insister sur les avantages de sa réforme : aucune retraite inférieure à 1000 euros par mois, un système plus juste pour les bas salaires, notamment les femmes. Fin des régimes spéciaux si décriés par ceux qui n’en bénéficient pas. Prise en cause de la pénibilité de certains métiers par un système de bonus de points. 

Mais les quelque trente personnes qui l’ont interpellé n’ont pas eu l’air d’adhérer à l’optimisme présidentiel. « Plus je vieillis, plus l’âge [du départ à la retraite] recule », s’est plainte une infirmière de 55 ans. Réponse du chef de l’Etat : l’âge légal fixé à 62 ans ne bougera pas. Néanmoins, a-t-il concédé, il faudra définir au cours du débat un « âge pivot » à partir duquel on pourra bénéficier d’une retraite pleine, sans décote. De même le Président n’a pas caché la nécessité de cotiser plus du fait de l’allongement de la vie. 

Interrogé sur les simulations parues dans la presse, M. Macron a expliqué qu’aucune d’entre elles n’était fiable à ce stade. Tout se jouera autour de la définition du fameux point : « on mettra des règles d’or pour fixer la valeur du point avec un engagement clair qui est que le niveau de vie des retraités ne doit pas être dégradé, il doit être le même et continuer à progresser. » Et pour rassurer à nouveau, il a rappelé que le système serait mis en place de manière progressive, jusqu’à 2040, voire plus tard encore pour les enseignants, les policiers et les infirmières. 

Place à la consultation sur les retraites

Dans son décryptage de l’intervention présidentielle, Le Monde a déploré l’absence d’éléments nouveaux, mais aussi un certain nombre d’approximations, notamment sur les trimestres supplémentaires versés aux mères de famille, ainsi qu’une déclaration jugée « déroutante » sur le régime des policiers, profession sous tension depuis plusieurs années. 

Place désormais au débat, notamment sur le site prévu à cet effet. M. Macron a déjà prévenu : ce débat ne remettra pas en cause les fondamentaux de la réforme. « Il va permettre d’ajuster, de changer, de modifier, de corriger. »

D’après un sondage Elabe paru ce même jeudi, 43% des Français sont opposés à la fusion en un système unique par points des 42 régimes existants. 32% y sont favorables et 24% sans opinion. Les prochains mois diront si la pédagogie gouvernementale est en mesure de faire évoluer l’opinion ou si le débat politique qui s’ouvre raffermira les opposants à cette réforme à haut risque.

Eric Fougerolles est un journaliste spécialisé dans le domaine de l’économie et de l’Europe. Diplômé de Sciences Po et en Droit communautaire, il travaille depuis une quinzaine d’années pour divers médias européens. Il est rédacteur pour Confluences.

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