Le gouvernement présente un budget en apesanteur

Le gouvernement présente un budget en apesanteur

La présentation du budget est un exercice hautement politique, un révélateur des priorités auxquelles entend s’attacher l’Etat pour l’année qui s’annonce. Encore plus quand elle intervient en pleine tempête économique, dans un climat d’incertitude maximale lié à l’épidémie de coronavirus.

Que dit le budget 2021 des intentions du gouvernement ? Déjà, que le pays traverse une période jamais vue, mais cela, on s’en doutait. Un budget « aussi ambitieux qu’incertain » pour Le Figaro, un budget « de tous les records » pour Les Echos, « un budget impossible » selon Le Monde. La presse, depuis hier, rivalise de qualificatifs pour décrire ce projet de budget à la fois exceptionnel par les sommes avancées et précaire quant à sa mise en oeuvre.

Un budget toutes vannes ouvertes

Exceptionnel, car il permet de prendre la mesure du « quoi qu’il en coûte » martelé par Emmanuel Macron au moment du confinement. Précaire, car tout le monde se demande si le projet de loi de finances présenté aux députés et aux sénateurs aura la moindre signification à l’issue de sa période d’examen. Car avec le virus qui semble reprendre de la vigueur et la menace d’un nouveau ralentissement de l’économie, il se pourrait que le gouvernement soit forcé de prendre rapidement de nouvelles mesures de soutien. Le Haut Conseil des Finances publiques souligne à ce titre « que les incertitudes demeurent extrêmement élevées ». Reste que le budget 2021 est là, prêt à être examiné par le Parlement.

Les esprits chagrins ergoteront sur les 100 milliards annoncés dans le cadre du plan de relance, dont on ne retrouve « que » 22 milliards dans le budget présenté hier. Mais le reste a été dépensé sur l’année en cours, d’autres milliards étant mobilisés pour l’année suivante et dans le cadre du budget de la Sécurité sociale.

Comme chaque année, on pourra se livrer au jeu des comparaisons entre les secteurs bien traités et les autres. Difficile, ici, de trouver des perdants « tant les vannes sont ouvertes ». D’abord, poursuit Libération, au service des entreprises, puisque le gouvernement continue de privilégier la politique de l’offre.

Du côté des missions de l’Etat, c’est la justice qui « s’en sort » le mieux avec une hausse de 8%. En hausse également, les sommes allouées à la Transition écologique, avec un accent mis sur le renouvelable et la rénovation thermique des bâtiments. Malgré les milliards déversés, les oppositions ne manqueront pas d’affirmer que ce n’est pas assez, que les sommes ne vont pas à ceux qui en ont le plus besoin, que les vraies priorités ne seront pas traitées et les contribuables les mieux lotis pas suffisamment mis à contribution.

Le gouvernement table sur un retour rapide de la croissance

Mais ce qui ne manquera pas frapper l’opinion, au-delà des arbitrages par secteur et des clivages partisans, c’est l’ampleur du déficit affiché (- 10,2% du PIB cette année, – 6,7% en 2021) et celle de la dette (116,2% du PIB l’an prochain).

Côté gouvernement, on assume. En pleine tournée des médias pour assurer le service après-vente de son projet de loi, Bruno Le Maire l’affirme : « nous nous endettons pour investir ». Il faut dire que les choses sont plus simples quand les Etats européens peuvent emprunter à des taux quasiment nuls. Les optimistes y verront un rare motif de satisfaction dans un paysage macroéconomique dévasté. Les pessimistes rétorqueront qu’il faut toujours rembourser sa dette, plus on attendra, plus l’addition sera lourde. Les réalistes diront que ce n’est pas quand l’économie est au bord du chaos qu’on peut se permettre d’avoir ce genre de débat.

Telle est l’attitude affichée par Bruno Le Maire qui a promis, en outre, que la dette serait bien remboursée, et cela sans hausse d’impôts. Pour ce faire, le gouvernement s’en remet au « retour de la croissance », le Godot des États impécunieux. En fixant à + 8% ses prévisions de croissance pour l’année à venir, le ministre table sur une reprise rapide, avec la perspective d’un retour au niveau de 2019 en 2022. Vu l’incertitude qui continue de régner sur le plan sanitaire, certains trouveront que c’est déjà optimiste.

Eric Fougerolles est un journaliste spécialisé dans le domaine de l’économie et de l’Europe. Diplômé de Sciences Po et en Droit communautaire, il travaille depuis une quinzaine d’années pour divers médias européens. Il est rédacteur pour Confluences.

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