Rémunérer les créateurs de contenus: la nouvelle stratégie des réseaux sociaux

Rémunérer les créateurs de contenus:  la nouvelle stratégie des réseaux sociaux

Spotify, Instagram, Facebook…Les plateformes de distribution de contenus peaufinent de nouveaux modèles économiques valorisant davantage les créateurs de contenus. L’enjeu : pallier le déséquilibre entre popularité, influence et rémunération en ligne.

De meilleures opportunités de rémunération pointent peu à peu leur nez pour les influenceurs, à savoir ces dizaines voire centaines de milliers de personnes qui cumulent des audiences significatives sur les réseaux sociaux en les alimentant chaque jour en textes, images et vidéos.

Il y a un an, Instagram remodelait dans ce sens son modèle de rémunération, partageant pour la première fois ses recettes publicitaires à hauteur de 55% avec ceux qui consentaient à activer la publicité sur leur IGTV, la fonctionnalité vidéo de la plateforme.

Le mois dernier, Apple annonçait dans cette perspective le lancement de Apple Podcasts. Cette nouvelle plateforme permet aux créateurs de contenus de fixer eux-mêmes leurs tarifs, le géant américain ponctionnant 30% des revenus la première année d’abonnement, 15% la deuxième. Quelques jours plus tard, Spotify lui emboîtait le pas : le géant du streaming s’octroiera 5% des recettes dès 2023.

Les réseaux sociaux en quête des meilleurs créateurs de contenus

La guerre est en fait déclarée chez les agrégateurs de contenus (streaming, réseaux sociaux…) pour attirer ceux qui les alimentent le mieux et fédèrent de nombreux « followers ». La stratégie adoptée par les géants du web, mais aussi les nouveaux arrivants : proposer de meilleures rémunérations alors qu’elles sont quasi-inexistantes.

Historiquement, leur modèle économique se base en effet largement sur du travail gratuit consenti et rémunéré symboliquement en popularité ou en engagement de la part de leurs communautés. Producteurs non rémunérés de contenus, les internautes puissants alimentent en continu, et sans rechigner, les flux Twitter, Instagram ou autres, participant gracieusement à leur dynamisme et donc à la production de richesses.

En effet, ceux qui bénéficient d’une large audience sont rares à pouvoir en vivre décemment. Ils génèrent en fait bien souvent des revenus à travers des activités qui ne sont pas financées par les plateformes, comme la promotion de produits à travers des partenariats commerciaux réalisés avec des marques. La publicité reste aujourd’hui la voie principale pour monétiser les contenus en ligne. Et parvenir à en vivre relève également de l’exploit. À titre d’exemple, 1 million de vues sur YouTube ne rapporterait qu’entre 2000 et 5000 dollars.

Rémunérer les contenus, la nouvelle stratégie des réseaux sociaux

Jusqu’ici, l’attraction des réseaux sociaux, leur caractère incontournable et l’abondance de contenus n’encourageaient pas les plateformes à rémunérer les créateurs de contenus malgré leur rôle primordial. Elles préféraient développer les meilleurs algorithmes possibles afin d’aider aux mieux les utilisateurs à découvrir le contenu qui correspond à leurs attentes et leurs goûts. L’enjeu :  les garder dans leurs filets.

Cependant, la situation est en train de changer. Les créateurs de contenus influents gagnent en expérience et tentent de tirer leur épingle de jeu en se dirigeant tout doucement vers des plateformes rémunératrices. La compétition des plateformes pour obtenir et conserver le meilleur contenu s’intensifie du même coup.

La tendance aux abonnements s’inscrit dans cette dynamique et participe à l’émergence « d’une classe moyenne » chez les créateurs de contenus. Avec un modèle de souscription par mois ou par an, il n’est en effet pas nécessaire de disposer d’une audience très large pour vivre de son activité. Un artiste peut gagner mensuellement 1500 euros brut si 300 personnes sont prêtes à débourser 5 euros par mois en s’abonnant à ses contenus. La clé du succès cependant : une audience engagée et plutôt fidèle sur le long terme.

La menace des nouveaux entrants

De nouvelles plateformes rencontrent ainsi un succès grandissant en permettent à leurs utilisateurs de capter directement les revenus de leur travail en ligne. Les joueurs amateurs ou pro de jeux vidéo monétisent leurs vidéos sur Twitch ou Roblox. Écrivains, blogueurs et influenceurs se tournent vers des outils de newsletters payantes comme Substack. L’essor de OnlyFans, une plateforme d’abonnements payants et qualifiée d’ « Instagram du porno », témoigne également de cette tendance œuvrant à des rémunérations en ligne de plus en plus décentes.

Face à cette nouvelle compétition, les réseaux sociaux historiques (Twitter, Instagram, Facebook…) tentent de rester dans la course. Twitter annonçait cette année la création de Super Follow, des abonnements premiums entre utilisateurs. L’enjeu pour ce réseau social mais aussi Facebook et Instagram : d’une part, éviter de devenir de simples plateformes promotionnelles gangrénées par la publicité et des posts sponsorisés. D’autre part, éviter qu’un nombre croissant d’influenceurs ne fassent leur promotion grâce à eux et ne redirigent leur audience vers d’autres plateformes plus rémunératrices.

Des plateformes toutes-puissantes

Cela dit, assiste-t-on pour autant à un empouvoirement des créateurs ? Rien n’est moins sûr. Les influenceurs restent en fait tributaires des plateformes tant que leur audience n’est pas solide. Quand c’est le cas, ce qui reste rare, ils peuvent alors se tourner vers des plateformes plus rémunératrices, mais parfois les contenus ne s’y prêtent pas vraiment.

Certaines plateformes sont par ailleurs si puissantes qu’elles continuent de faire la loi, donnant ainsi l’illusion de tenter de mieux rémunérer les créateurs de contenus alors que les sommes attribuées restent dérisoires. Spotify, le leader du streaming musical, a beau multiplier les annonces, les revenus générés par le stream attisent depuis des années la colère des artistes. 1 million d’écoutes, le chiffre d’un tube, rapporte entre 3000 et 3500 dollars…

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