Employés et employeurs britanniques vont désormais contribuer davantage au financement des services de protection sociale. Les députés ont voté une hausse de 1,25% de l’assurance nationale (National Insurance). La mesure soulève de nombreuses critiques.
« Nous devons maintenant aider le National Health Service à se remettre », a déclaré à la Chambre des Communes le Premier ministre britannique, brisant alors ouvertement une promesse de campagne en annonçant une augmentation des cotisations sociales. L’enjeu : remettre sur pied le système de santé du pays, largement mal en point depuis la crise sanitaire.
Boris Johnson faisait alors le choix de s’aliéner une partie de ses électeurs et de la majorité conservatrice, traditionnellement opposée à toute augmentation d’impôts. Le Premier ministre a donc intelligemment déclenché un vote avec un très court préavis de 24 heures afin d’empêcher que l’opposition ne s’organise dans son camp. Une manœuvre qui a porté ses fruits : la mesure a finalement été approuvée par la Chambre des communes à 319 voix contre 248.
Une mesure injuste
Mais en quoi consiste au juste cette mesure ? Le budget actuel de système de santé ne permet pas de résorber l’ensemble des dépenses et oblige encore trop de personnes à prendre eux-mêmes en charge de lourds frais de santé. La situation contraint ainsi de nombreux britanniques à vendre leur propriété pour subvenir à leurs besoins. Pour y pallier, la réforme prévoit un plafond de dépenses. Cela signifie qu’à partir d’octobre 2023, les britanniques ne paieront pas plus de 86 000 £ en frais de protection sociale (hors nourriture et logement) au cours de leur vie. Une fois qu’ils auront atteint ce seuil, les coûts seront pris en charge par l’Etat. Pour les travaillistes, cependant, dont le leader Keir Starmer, un tel plafond est encore trop élevé et n’empêcherait pas certains de vendre leur maison.
Les désaccords les plus prononcés concernent cependant le financement de la mesure. Une hausse de 1,25% d’une contribution financière appelée l’assurance nationale se chargera de renflouer les caisses de l’assurance sociale britannique. Cette augmentation permettra d’injecter près de 36 milliards de livres (soit 42 milliards d’euros) dans le système de santé d’ici 3 ans et de soutenir les individus fragilisés, à l’instar des personnes âgées et atteintes de démence notamment.
Une augmentation de cotisations ciblant les revenus du travail
La mesure s’appliquera en avril 2022. Elle concernera les travailleurs et les employeurs, et touchera avant tout les revenus du travail. Les revenus des retraites et de la propriété échapperont de fait à cette hausse. Cela signifie que de nombreux électeurs âgés et aux revenus élevés seront épargnés de payer quoi que ce soit alors même qu’ils sont les premiers bénéficiaires du système de santé.
Le fardeau de la réforme tombe ainsi sur les travailleurs salariés et donc de manière disproportionnée sur les travailleurs pauvres et les jeunes. Le Premier ministre a semble-t-il profité de l’incompréhension qui règne en Grande-Bretagne autour de cette « assurance nationale » pour en augmenter les cotisations.
L’assurance nationale en cause
Les critiques fusent et fustigent ainsi une réforme qui aurait pu être menée avec plus de justice sociale. Même le média très libéral The Economist, remet en cause cette décision, affirmant que « cette expansion nécessaire de l’État-providence est mal payée ». Pas moins de trois anciens chanceliers conservateurs de l’Échiquier se sont joints au chœur des critiques, dont le conservateur Philip Hammond, qui a déclaré qu’il voterait contre un tel plan à la Chambre des Lords. Mais Boris Johnson a repoussé les critiques, affirmant que c’était « la première fois que l’État intervenait réellement pour faire face à la menace de coûts catastrophiques ».