« L’essence du luxe reste le magasin et l’événementiel » Antoine Arnault (LVMH)

« L’essence du luxe reste le magasin et l’événementiel » Antoine Arnault (LVMH)

Réputées peu séduites par la modernité numérique, les grandes marques de la mode et du luxe ont dû faire au mieux, en s’y convertissant petit à petit, notamment après l’apparition du Covid-19. Pas question cependant d’oublier le «physique», surtout pour les grands événements dont raffole le secteur. Selon Antoine Arnault, administrateur chez LVMH, l’essence du luxe reste « le magasin, la vitrine, l’outdoor, les médias traditionnels et l’événementiel ».

Depuis quelques années, la mode est à la digitalisation. Avec les confinements à répétition, les exigences de la lutte contre le dérèglement climatique, et, surtout, les nouvelles possibilités offertes par l’évolution des TIC (technologies de l’information et de la communication), les grandes griffes, à travers le monde, revoient petit à petit tous leurs processus de vente et de mise en avant de leurs produits. Bien loin de l’image – qu’elles ont pu vouloir véhiculer par le passé – de forteresses hermétiques à tout changement qui leur collait à la peau.

Pandémie de coronavirus oblige, les salons et autres shows ont fait un bond de géant dans la virtualisation, obligeant les marques les plus prestigieuses à se convertir au digital. C’est que la crise sanitaire n’a pas épargné le secteur du luxe, qui a connu une baisse de ses revenus à hauteur de 29 % au premier semestre 2020 ; dans le même temps, l’essor du e-commerce n’a pas trop laissé le choix aux grandes maisons que d’ouvrir des boutiques virtuelles sur Internet afin de conserver leurs parts de marché.

En septembre dernier, Moncler s’est ainsi laissée tenter par l’expérience. La marque italienne a demandé à 11 créateurs et créatrices de mode internationaux de présenter leur collection, lors d’un défilé aux allures de véritable talk-show présenté par la star américaine Alicia Keys, en direct… du site Internet et de ses réseaux sociaux de la marque, qui diffusait l’événement sur le Web. « En ces temps d’évolution constante, je crois vraiment au pouvoir de connecter les communautés du monde entier par le biais des expériences », s’est expliqué Remo Ruffini, le président-directeur général de Moncler.

Antoine Arnault (LVMH) : « notre essence reste le magasin, la vitrine, l’outdoor »

Pour beaucoup, l’arrivée du numérique dans le monde du luxe a révolutionné le secteur et sauvé les grands rassemblements, pour la fashion week par exemple. En mars 2021, la Fédération de la Mode et de la Haute Couture s’est finalement prononcée pour des événements digitaux uniquement (Londres, Milan) ; les maisons de couture ont dû s’adapter pour présenter différemment leur nouvelle collection printemps-été 2021 – certaines ayant recours à diverses stratégies, comme la publication de teasers, pour gagner du temps.

Les événements, dans le monde de la mode et du luxe, sont avant tout de véritables shows, dont il est difficile d’apprécier la (dé)mesure derrière son écran. Idem, que ce soit pour acheter un sac ou un vêtement – peut-être même plus encore un bijou -, « expérimenter » le produit, le tenir, l’essayer, obtenir quelques conseils de la part de vendeuses et vendeurs aguerris. D’où l’importance, clament certains noms du secteur, de conserver un pied dans la vraie vie. In real life. Et mêler ainsi digital et physique.

C’est en tout cas l’avis d’Antoine Arnault, directeur Image & Environnement du groupe LVMH, qui avait d’ailleurs été à l’initiative, en 2009, du premier défilé en live sur le réseau Facebook. Pour Antoine Arnault, le secteur de la mode doit impérativement miser sur « une alliance entre le respect absolu de l’ADN des maisons et une dose importante d’innovation et de créativité. » S’il a bien conscience que «les réseaux sociaux sont devenus essentiels» – raison pour laquelle LVMH continuera « à embrasser [leur] développement [et] à proposer des contenus sur TikTok, Instagram et toute autre plateforme qui présentera de l’intérêt pour nos communautés » -, Antoine Arnault veut « croire très fermement [dans les] supports en dehors de la sphère digitale ». L’ « essence-même » du leader mondial du luxe, comme celle de bon nombre de groupes à travers le monde, reste « le magasin, la vitrine, l’outdoor, les médias traditionnels ou encore l’événementiel à travers les grandes expositions que nous organisons ».

Plutôt que de passer au « tout numérique », beaucoup de responsables des secteurs du luxe et de la mode entendent jouer sur les deux tableaux. Si bien qu’un terme est même apparu, pour désigner cette double tendance : le «phygital», contraction de « physique » et « digital ». « Dans le futur, je suis convaincu que le digital jouera un rôle prépondérant, mais même si ces canaux sont très efficaces, je continue à être personnellement plus ému par un affichage géant que par une publicité Instagram de quelques secondes sur un mini écran », résume Antoine Arnaud. Et il est difficile de lui donner tort.

 

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