Assureurs mutualistes et réassureurs : un rapprochement complémentaire ?

Assureurs mutualistes et réassureurs : un rapprochement complémentaire ?

Dans le contexte de rapprochement entre les réassureurs (les « assureurs des assureurs ») et les sociétés d’assurance, les mutualistes ont une carte à jouer, tant ils sont complémentaires avec les métiers de la réassurance. En Europe, si le segment mutualiste – réassureur n’est occupé que par l’Allemagne, via le duo Talanx/Hannover Re, la France est en passe de se doter d’un champion, avec l’annonce de rachat de PartnerRe par le groupe Covéa.

En juin 2021, l’assureur espagnol MAPFRE a publié son classement des quinze principaux groupes européens d’assurances en 2020. Sur le podium des primes encaissées, le français Axa arrive en tête avec 93,9 milliards d’euros, suivi de l’allemand Allianz (82,9 milliards d’euros), puis de l’italien Generali (70,7 milliards d’euros). Un haut du panier révélateur du reste de ce classement, puisque la France est le pays le plus représenté avec cinq sociétés, qui cumulent un volume total de 187 milliards d’euros de primes (Axa, Crédit Agricole Assurances, CNP, Assurances, BNP Paribas Cardif, Covéa). L’Hexagone propose ainsi les services les plus attractifs, mais est talonné par l’Allemagne (160 milliards d’euros) qui compte, par ailleurs, moins d’assureurs (Allianz, Talanx, R+V, Ergo).

Une convergence grandissante entre assurance et réassurance en Europe

Plus d’une dizaine de lauréats proposent en outre des services de réassurance. Leur nombre pourrait encore prochainement augmenter, puisque Covéa semble être sur le point de conclure le rachat du réassureur bermudien PartnerRe, nouvelle illustration d’une véritable tendance à la convergence entre ces deux mondes. Un nombre grandissant d’assureurs acquièrent ainsi des sociétés de réassurance (Sompo-Endurance, AIG-Validus, Axa-XL…). En parallèle, de plus en plus de réassureurs se lancent dans la couverture de grands comptes par le biais de filiales d’assurance (Swiss RE, Munich RE…).

Chercheurs à l’Institut Choiseul, Olivier Pastré (professeur d’économie à l’Université Paris VIII) et François-Xavier Albouy (directeur de recherche de la chaire Transitions démographiques, Transitions économiques) associent ce rapprochement à une « évidence industrielle ». Celui-ci présente en effet de nombreux atouts, à commencer par des offres plus complètes de couverture, qui peuvent s’avérer utiles pour les risques majeurs, notamment environnementaux, dans un monde « post-Covid » semé d’incertitudes. Pour un assureur, la prise de contrôle d’un réassureur lui permettra d’augmenter ses marges, par la diversification de ses activités, mais pourra également lui permettre de s’ouvrir à l’international.

Le pari des mutualistes par rapport aux assureurs anonymes

Ce qui attire aussi l’attention dans le classement, c’est la présence de mutualistes avec l’allemand Talanx via HDI (41,1 milliards d’euros de primes encaissés) et le français Covéa (16,5 milliards d’euros), respectivement à la cinquième et quatorzième place. Pour rappel, les assureurs prennent le plus souvent la forme de sociétés anonymes – dont font partie les « bancassureurs » tels que Sogessur et BNP Paribas Cardif ​​– ou de sociétés d’assurances mutuelles.

Bien que la quête de rentabilité ne soit pas dans leur ADN, les mutuelles, lorsqu’elles s’associent avec des réassureurs, peuvent témoigner d’une « réussite frappante ». Comme le relève l’Institut Choiseul, leurs capitaux ont tendance à être plus significatifs et stables que ceux des sociétés anonymes, car ces dernières sont contraintes de verser annuellement des dividendes. Or les réassureurs ont besoin de capital pour gérer les risques majeurs, ainsi que de stabilité pour absorber les crises sans se soucier de la volatilité de leurs activités. Ainsi, « l’adossement d’un réassureur à une mutuelle permet rapidement d’obtenir des performances exceptionnelles et à long terme des positions très solides et très rentables ». La référence à cet égard est Talanx qui a dépassé cette année le milliard d’euros en résultats nets, grâce notamment à la hausse de bénéfices de sa filiale de réassurance Hannover Re.

Émergence d’un poids lourd français

Le jeudi 16 décembre 2021, Covéa, qui regroupe entre autres MAAF, MMA et GMF, a signé un accord avec Exor pour l’acquisition, à hauteur de 7,8 milliards d’euros, du douzième réassureur mondial PartnerRe (Bermudes). Le groupe voit dans cette transaction une opportunité en faveur de la densification et de l’internationalisation de ses activités, notamment en zone américaine. Ses possibilités de croissance sur le marché français de l’assurance de dommages et responsabilité, dont il est déjà le leader, sont en effet assez limitées. Pour que cette opération aboutisse, Covéa devra toutefois obtenir l’accord des autorités de régulation de dix pays dans lesquels PartnerRe est actif. Le cas échéant, le mutualiste, selon les mots de son président-directeur général Thierry Derez, aura l’occasion de devenir un « groupe d’assurance et de réassurance européen de premier plan ». Et, pourquoi pas, de pérenniser la place de la France dans les prochains classements européens.

 

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