Les livreurs sous-traitants en ont marre 

Les livreurs sous-traitants en ont marre 

Pour livrer toujours plus vite au même prix, les entreprises de livraison ont désormais énormément recours à la sous-traitance. Elles ont ainsi à disposition des livreurs moins cher, et souvent moins bien traités.

Mêmes uniformes, rémunération différente 

Le cas d’UPS (United Parcel Service), le géant américain du service postal, est l’exemple type de la sous-traitance à outrance. « La part de la sous-traitance n’a pas cessé d’augmenter au fil des années, 90  % des chauffeurs sont désormais sous-traitants, certains sites sont totalement externalisés tandis que d’autres ne comptent plus que quelques chauffeurs UPS. À Mulhouse, par exemple, ils ne sont plus que trois pour plus de quarante prestataires », illustre l’un des responsables CGT de l’entreprise.

« Nous avons presque les mêmes camions et uniformes, mais pas la même rémunération que les chauffeurs UPS. Eux ont un treizième mois, de l’intéressement, différentes primes…  », témoigne un ancien livreur sous couvert d’anonymat, désormais gérant de sa propre boîte de livraison.

Différence de traitement

« Dans certains dépôts, les sous-traitants n’ont pas accès aux quais. Ils doivent mettre les colis sur une étagère roulante, très lourde à déplacer, et l’emmener sur le parking. Et la plupart du temps, les salariés sous-traitants sont exposés aux intempéries », explique Nathalie Arnoud, psychologue et médecin du travail à Issy-les-Moulineaux.

« Dans mon dépôt, une petite partie des chauffeurs sont des salariés UPS, alors que les autres travaillent pour des sous-traitants. Les chauffeurs UPS ont accès à des outils de manutention quand nous devons nous contenter de diables », témoigne notre livreur anonyme. D’ailleurs, les chauffeurs UPS « n’ont (parfois) pas à charger leur camionnette, ce sont des agents de quai qui s’en chargent. Dans mon entreprise, à tour de rôle, deux des huit conducteurs commencent avant leur tournée pour charger les vans », ajoute-t-il.

Manque de moyens

« Certaines agences ( de sous-traitance) se résument à des hangars dans lesquels les colis sont entassés en tas et où les camionnettes viennent charger, sans qu’il n’y ait de sens de circulation clairement établis. La logique qui prévaut est de réduire au maximum les dépenses », tempête Romain, un inspecteur du travail spécialiste de ce type d’entreprises, qui dénonce une sorte de « sous-traitance pyramidale ». «Un salarié étranger en France depuis quelques années est incité par son employeur à monter une entreprise. Il embauche ensuite des personnes de sa communauté fraîchement arrivées et celles-ci travaillent en utilisant l’identité d’une autre personne. Il peut même arriver que la personne qui conduit n’ait pas de permis de conduire », explique Romain.

« Certaines des camionnettes de la société qui m’emploie sont en très mauvais état, ont des freins défectueux et n’ont pas passé le contrôle technique », témoigne Jean-Charles, employé par un sous-traitant de Colis privé.

Journées interminables

Enfin, la dernière inégalité avec les livreurs salariés  concerne le temps de travail. « La semaine dernière, j’ai travaillé 55  heures sur six jours, et cette semaine, j’en suis déjà à 36  heures en quatre jours », explique Jean-Charles, admettant que parfois, « il arrive qu’on jette le colis par-dessus la barrière ».

Et ces journées interminables poussent parfois les livreurs jusqu’à la rupture. Tel fut le cas d’un sous-traitant d’UPS ayant lui aussi souhaité garder l’anonymat. « La tournée qu’on m’a donnée comptait 123  stops, habituellement c’est entre 60 et 70. J’ai vu que c’était impossible seul, et après un échange avec mon boss, j’ai ramené le camion au dépôt en fin de matinée », explique-t-il. Le lendemain, « ils m’ont dit qu’ils ne voulaient plus me voir ici, que je devais immédiatement rendre mon badge  ».

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