Des fuites suspectes visibles depuis la surface de la mer baltique ont été détectées lundi et mardi sur les gazoducs Nord Stream 1 et 2 – pourtant à l’arrêt (mais toujours pleins) depuis plusieurs semaines – dans la zone économique exclusive du Danemark. De nombreuses voix se sont immédiatement élevées pour dénoncer un acte de sabotage.
Une semaine de réparation
Mardi soir, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a indiqué sur Twitter avoir « parlé de l’acte de sabotage Nord Stream » avec la Première ministre danoise, Mette Frederiksen.
« Il est primordial d’enquêter sur les incidents et de faire toute la lumière sur les événements. Toute perturbation délibérée de l’infrastructure énergétique européenne active est inacceptable et entraînera la réponse la plus ferme possible », a également fait savoir la dirigeante européenne. De son côté, la responsable danoise a réaffirmé qu’il s’agissait d’« actes délibérés. On ne parle pas ici d’un accident ».
Les trous dans le gazoduc sont « trop gros » pour être accidentels, d’autant qu’ils ont été causés « par des détonations », a ajouté le ministre danois de l’Energie, Dan Jørgensen, précisant qu’il faudrait « au moins une semaine » pour les combler. Un avis partagé par l’expert suédois Peter Schmidt : Une « émission massive d’énergie » de magnitude de 1,9, puis une autre de magnitude 2,3 ont été enregistrées juste avant que les fuites ne soient repérées, or « il n’y a pas grand-chose d’autre qu’une explosion qui peut avoir provoqué des émissions d’énergie aussi importantes ».
Accusation unanime
Tout le monde s’accorde à dire, de Washington à Varsovie, en passant par Bruxelles et Moscou, qu’il s’agit d’un sabotage, mais pour l’heure, personne n’est officiellement pointé du doigt. « Nous voyons clairement que c’est un acte de sabotage, qui marque probablement la prochaine étape de l’escalade de la situation en Ukraine », a déclaré le Premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, tandis que le conseiller de la présidence ukrainienne, Mykhaïlo Podoliak, a lui dénoncé « une attaque terroriste planifiée » (par Moscou). Toutefois, le camp russe a lui aussi dénoncé ce sabotage, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, se disant « extrêmement préoccupé par ces nouvelles ».
Selon le spécialiste du gaz Thierry Bros, une fuite pourrait être due à un changement de pression en mer baltique, mais celles-ci sont extrêmement rares, alors trois … Mais quoi qu’il en soit, « si c’est un sabotage, il faut chercher à qui profite le crime », ajoute Thierry Bros. Pour démontrer sa capacité de nuisance, Moscou n’aurait eu besoin que d’une fuite, estime l’expert, écartant pour le moment la Russie.
Selon Simone Tagliapietra, chercheur pour le think tank Bruegel, un tel sabotage pourrait plutôt viser à « créer un stress supplémentaire sur le marché du gaz ». Mais dans le fond, peu importe qui est responsable. « Pour l’Europe, quel que soit l’auteur, c’est un avertissement. On doit se préparer à bien surveiller nos pipelines », prévient Thierry Bros.