Fulgurante ascension de l’armateur CMA-CGM

Fulgurante ascension de l’armateur CMA-CGM

Les quantités de marchandise transportées en conteneurs ne cessant d’augmenter, les armateurs voient également leurs revenus bondir. Le français CMA-CGM, numéro trois mondial du secteur, surf logiquement sur cette vague … mais sans en faire profiter son pays. 

Conséquence du droit de tonnage

« Nous vivons une période de demande exceptionnelle, du fait de la pandémie. On ne s’attendait pas à une telle explosion du marché à la hausse », se félicite Rodolphe Saadé, PDG de CMA-CGM. Mais cette situation favorable ne profite hélas pas au reste du pays, et pour cause  : depuis 2003 les armateurs peuvent opter pour un « droit de tonnage », une petite taxe forfaitaire indexée sur la capacité de transport des navires, qui se substitut, pour les activités de fret, à l’impôt sur les sociétés (IS). Les armateurs ne payent donc l’IS que sur leurs autres activités (logistique, services portuaires) qui ne représentent qu’une faible part de leur activité ; 3% dans le cas de CMA-CGM.

Le droit de tonnage avait à l’époque été mis en place pour convaincre les armateurs européens de « ne pas immatriculer leur flotte dans les paradis fiscaux à une époque où les échanges mondialisés étaient en fort développement », rappelle l’économiste Julien Pillot, enseignant-chercheur à l’Inseec Business School. Et ce fut un pari gagnant. Cette taxe a permis de « conserver les emplois et de la valeur ajoutée sur le territoire européen, en plus de récupérer un peu de fiscalitéMais personne n’avait prévu qu’une reprise aussi synchrone de l’économie mondiale, comme nous l’avons vécue récemment, se produirait et viendrait ainsi gonfler les bénéfices des grands armateurs mondiaux… », pointe l’expert.

Inquiétudes concernant CMA-CGM

Les superprofits de l’armateur français sont tels qu’ils lui permettent de négocier avec l’Etat tout en gagnant en influence. « Actuellement, Rodolphe Saadé multiplie les chèques et achète la paix auprès de l’État grâce à des deals hyper stratégiques », analyse un bon connaisseur du dossier. L’armateur est par exemple venu à la rescousse de l’Etat en rachetant des parts d’Air France-KLM ou encore de l’opérateur de satellite stratégique Eutelsat. « Nous avons de très bonnes relations avec le gouvernement, nos discussions sont fréquentes sur des sujets importants et notre dialogue est très positif. Certaines de nos opérations sont réalisées en bonne intelligence avec lui », admet lui-même Rodolphe Saadé.

Mais cette mainmise sur différents secteurs de l’économie inquiète bon nombre d’experts. « Dans la mer, dans les airs, sur la route, dans la logistique, l’e-commerce, la livraison du dernier kilomètre, sans oublier les nouvelles technologies associées, CGA-CGM rachète toute sa chaîne de valeur.  Il est en train de battre le fer quand il est chaud pour acter une position dominante qui lui sera difficilement contestable demain », prévient Julien Pillot. 

« Il ne faudra pas venir pleurer quand ce type d’acteurs qu’on a laissé emmagasiner des superprofits utiliseront leur position de force pour augmenter leurs prix, avec des conséquences concrètes sur la baisse du pouvoir d’achat des ménages », abonde un autre économiste, sous couvert d’anonymat.

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