Jeudi 15 décembre, le milliardaire a fait suspendre les comptes d’une dizaine de journalistes américains couvrant le rachat de Twitter et généralement hostiles à Elon Musk. Ce dernier est revenu sur sa décision vendredi, mais trop tard pour ne pas montrer son vrai visage.
Inquiétude des médias
« La suspension impulsive et arbitraire de plusieurs journalistes, dont Donie O’Sullivan de CNN, est inquiétante. L’instabilité croissante de Twitter devrait être une source de préoccupation majeure pour les utilisateurs de ce réseau social », a alerté vendredi la chaîne d’information en continu CNN.
Même son de cloche au Washington Post, dont le compte d’un des rédacteurs a également été suspendu. « Drew Harwell a été banni de Twitter sans avertissement ni explications, à la suite de la publication d’informations sur Elon Musk. Il doit retrouver ses accès immédiatement », prévient le quotidien.
Les médias ont d’ailleurs bénéficié du soutien de la représentante démocrate Lori Trahan, qui surveille Elon Musk de près. « Mon équipe avait rencontré Twitter ce jeudi, et ils nous avaient assuré qu’ils ne s’en prendraient jamais aux médias et aux chercheurs. Moins de 12 heures plus tard, des journalistes Tech sont suspendus. Que se passe-t-il, Elon Musk ? », interroge l’élue.
Modification du règlement
Les journalistes suspendus auraient, selon Elon Musk, révélé sa position. Ils ont « publié ma géolocalisation en temps réel, autant dire des coordonnées pour mon assassinat, en violation directe des règles de Twitter. Ils peuvent me critiquer à longueur de journée, mais pas mettre en danger ma famille », s’est justifié jeudi le milliardaire. Elon Musk faisait référence ici à un incident survenu mercredi, lorsqu’une voiture transportant l’un de ses fils avait été suivie par un « harceleur timbré qui croyait que j’étais à l’intérieur ».
Dès jeudi, les règles d’utilisation de Twitter ont donc été modifiées : « Tout compte qui révèle la localisation en temps réel d’une personne sera suspendu, et cela inclut les liens pointant vers les sites publiant ces informations », stipule désormais le règlement. Et ce sont ces mêmes règles qui ont servi de fondement aux suspensions de comptes le jour même. « Vous avez doxé (divulguer des informations privées), vous êtes suspendus, fin de l’histoire. Ce n’est pas parce que vous êtes journalistes que vous aurez droit à un traitement spécial », s’est encore justifié Elon Musk.
Rétablissement décidé par sondage
Mais le milliardaire est finalement revenu sur sa décision vendredi, après l’avoir soumise à la volonté du peuple, grâce à sondage lancé sur Twitter. « Les gens ont parlé. Les comptes qui avaient publié ma localisation vont voir leur suspension levée », a-t-il tweeté.
« On nage en plein cauchemar kafkaïen », s’alarme Christophe Deloire, secrétaire général de Reporters sans frontières. « La censure de journalistes et l’édification de nouvelles règles pour complaire aux décisions du chef ne sont pas les marques d’un espace informationnel en bonne santé », prévient-il.