Le ministère de la Transition écologique a récemment tiré la sonnette d’alarme, estimant que plus de 50 000 logements devraient être touchés par l’érosion côtière et la submersion d’ici 2100. Des fissurations dues à l’affaissement des sols sont également à redouter plus à l’intérieur des terres.
Outils au service des assureurs
Premiers concernés par les dégâts, les assureurs tirent la sonnette d’alarme. « Tous les cinq ans, le coût des risques climatiques est multiplié par deux, affirme Pascal Demurger, directeur général de la Maif. Si nous n’agissons pas, à un horizon 2050, le monde sera devenu inassurable ».
Dans un souci de transparence pour l’acheteur, et pour simplifier le travail des assureurs, le gouvernement a mis plusieurs outils en place sur lesquels figureront tous les risques auxquels un logement est exposé. « La loi Climat et résilience oblige le vendeur (ou le propriétaire en cas d’une location) à remettre aux acheteurs (ou aux locataires) l’état des risques dès la première visite du logement, précise-t-on au ministère de la transition écologique. Ce document devra avoir été établi depuis moins de 6 mois ».
En tant que ressource d’avenir, les données auront bien sûr leur rôle à jouer dans cette course contre la montre. « Nous proposons un ensemble d’outils qui permettent de recueillir des informations sur la morphologie des bâtiments, explique Chloé Clair, directrice générale de NamR, société spécialisée dans la production de données géolocalisées au service de la transition écologique. Cette technique permet de croiser les informations climatiques avec les natures de sol et permet de prédire à la suite de sécheresses récurrentes, quelles habitations subiront des dommages. Actuellement, 10 millions de maisons se trouvent sur des zones à risques (exposition moyenne et supérieure), soit 46% des maisons individuelles en France ».
Faible conscience des risques
Les conséquences des rapports des experts sur le prix des biens varient selon les risques. En effet, « les risques impactent les prix de l’immobilier, mais différemment », explique Jeanne Dachary-Bernard, chercheuse de l’Institut national de la recherche agronomique (Inrae).
« La conscience du risque d’érosion n’est pas encore là parce que, pour prendre conscience d’un risque, il faut parfois le vivre. On peut être amené à vivre une inondation. En revanche, on perçoit moins l’érosion qui est un phénomène lent. Mais lorsque celui produira ses effets, ce sera brutal », prévient la spécialiste. Mais même concernant les inondations, les acheteurs manquent souvent de prudence. Ceux qui ne l’ont pas vécu seront « attirés par la vue imprenable si le logement est en bord de mer », assure Jeanne Dachary-Bernard.
« Le littoral est encore le lieu où on négocie le moins, abonde maître Frédéric Violeau, notaire chargé des statistiques immobilières nationales du Conseil supérieur du notariat. Nous ne notons aucune prise de conscience du recul du trait de côte. Les acquéreurs ne voient que la maison près de la mer mais pas la mer qui peut arriver dans le salon ».
Illustration à Cabourg, dans le Calvados (14), où un couple de retraités parisiens s’est offert une maison pieds dans l’eau, c’est le cas de le dire. « Nous l’avons achetée il y a 18 ans. À l’époque, on ne parlait pas des risques naturels. Mais un voisin nous a dit «Vous êtes fou ! Votre maison sera sous l’eau». Nous avons encore un peu de temps. Mais, vu l’évolution de la plage ( nous n’avons pratiquement plus de sable sec, les balustrades ont été refaites ) … Nous prendrions plus en compte ces risques si nous devions acheter aujourd’hui », regrette Nathalie, 68 ans.